Si je vous dis premier sport féminin français, à quoi pensez-vous ? Vous l’aurez peut-être compris, aujourd’hui on parle de cheval. La Fédération Française d’Équitation possède environ 80 % de licenciées, mais ça n’a pas été toujours le cas, bien au contraire… D’abord objet de prestige et outil de guerre, le cheval est un animal qui a su s’imposer au cours de l’histoire en tant que fidèle compagnon, mais aussi comme étant au cœur d’enjeux sportifs. Malgré cela, l’équitation n’est pas une discipline réservée uniquement aux femmes, puisque celle-ci leur a longtemps été interdite.
Le cheval, symbole de prestige
Les premières traces de domestication du cheval remontent à 3 000 avant Jésus-Christ, on retrouve également quelques témoignages de femmes nobles perses montant à cheval. Le mythe le plus connu est celui des Amazones, dans la Grèce antique, elles étaient des guerrières qui venaient brimer le patriarcat dominant. En effet, la société voulait que l’homme soit en extérieur sur le terrain et la femme au sein du foyer. C’est pour cela que les femmes d’un rang social ordinaire ne pouvaient monter à cheval. À cette époque, l’utilisation des chevaux est essentiellement masculine et à des fins militaires. Le cheval était un objet de privilège, mais aussi un symbole de force guerrière.
Atilla disait que le cheval, en permettant à l’homme « d’aller plus vite et de voir plus loin, en fait un surhomme ».

Au Moyen-Âge, la pratique équestre féminine était vivement contrôlée. Cependant, certaines corporations acceptaient les veuves afin qu’elles puissent continuer l’activité de leurs défunts maris. Dans certaines exploitations agricoles, les femmes travaillaient souvent avec les hommes, ce qui leur permettait d’être en contact avec les chevaux de trait. De plus dans la haute société, certaines femmes voyageaient à cheval pour des engagements sociaux ou familiaux. Nous avons l’exemple des religieuses qui effectuaient des pèlerinages à cheval. Il faut savoir qu’au XIIe siècle, on parle de monte en amazone, ainsi les femmes restaient fortement dépendantes des hommes puisqu’elles en avaient besoin pour monter et descendre de leurs montures. Même si le Moyen-Âge est souvent vu comme une période un peu obscure, on remarque que dans le domaine équestre celui-ci fait preuve de quelques avancées.
Qu’en est-il à partir du XVIe siècle ?
Durant la Renaissance, l’équitation est associée exclusivement à la gent masculine, notamment avec le développement de sport équestre comme la joute. Mais le cheval reste avant tout un animal dit utilitaire lié aux activités agricoles et également militaires.
Cependant, à partir du XVIIe siècle dans le sud-ouest de la France, quelques académies équestres accueillent des femmes. Cela leur permet d’accompagner leurs maris à la chasse à courre. Mais n’oublions pas qu’à cette époque les femmes doivent avoir une certaine image en société, ainsi le traité de Gabriel Dubreuil en 1669 met l’accent sur la belle posture que les femmes doivent avoir à cheval. Cette évolution européenne n’est pas la même partout dans le monde, notamment en Perse. À cette époque, il était formellement interdit aux femmes de pratiquer l’équitation, seules les prostituées pouvaient monter librement à cheval. Revenons en Europe, c’est sous la Monarchie de Juillet que l’équitation devient désormais l’une des seules activités physiques préconisées aux femmes de l’élite. De plus, de nombreuses femmes s’affirment dans le domaine équestre, notamment dans les cirques. Nous avons l’exemple de Caroline Loyo présente au cirque d’hiver à Paris en 1833. Changement radical dans les années 1840 puisque les écuyères deviennent majoritaires au sein des cirques.

C’est au tournant du XIXe siècle que l’équitation prend une dimension plus féminine, notamment avec les spectacles de voltige et de dressage. Malgré ces évolutions, à cette époque, les sociétés occidentales pensent encore que l’équitation est une pratique réservée aux hommes. D’ailleurs, la pratique à califourchon restera interdite aux femmes françaises pendant de nombreuses années.
« En réduisant les femmes à une utilisation limitée du cheval leur interdit un accès égalitaire au cheval qui, pendant des siècles, représente la liberté et le déplacement, le pouvoir et la domination » Catherine Tourre-Malen
Et de nos jours ?
En 1930, une première loi autorise les femmes à porter des pantalons pour la pratique équestre puis quelques années après les compétitions de dressages et de sauts d’obstacles deviennent elles aussi ouvertes aux femmes. À partir, des années 1970, de nombreuses jeunes filles issues de classes moyennes commencent à pratiquer l’équitation qui devient un sport plus accessible. De même, la vision de ce sport change et devient synonyme de rapprochement à la nature. À la fin du siècle, l’équitation est même pratiquée par 75 % de femme en France et le phénomène est encore plus important au Royaume-Uni. De nos jours, l’équitation est aussi le seul sport individuel mixte aux Jeux olympiques. Actuellement, la Fédération Française d’Équitation compte près de 80 % de licenciées féminines. Cependant à haut niveau l’équitation est largement représentée par des hommes.Les femmes seraient-elles attirées par le cheval en tant que tel et les hommes auraient-ils eux plus d’attraits pour le sport en lui-même ? Nous ne pouvons réellement le savoir. Malgré cela, le cheval est un animal proche de l’homme depuis l’Antiquité et il le restera pour longtemps.
