Les Éditions Universitaires d’Avignon ont participé à la Nuit de la lecture 2021, pilotée à l’université par la Maison de la culture et de la vie de campus, avec notamment une soirée de rencontres, le 23 janvier. Lors de cette soirée, nous avons découvert deux auteurs, un auteur et une autrice, des collègues, qui avaient écrit ensemble un texte remarquable. Nous avons eu envie de le publier, mais, à l’origine, il s’agissait vraiment d’un court texte. Nous leur avons alors demandé s’il leur était possible d’ajouter une suite. Ils l’ont fait, sans dénaturer la fraîcheur du texte initial… pour notre plus grand bonheur, que nous sommes très heureux de partager.
J’ai 19 ans, tout ce que j’ai entrepris, j’ai réussi. J’ai décidé de changer de vie.
L’Amérique du Nord, me fait rêver… la Californie, le Nouveau-Mexique, le Texas et par-dessus tout le désert du Nevada.
Je décide de réserver mon voyage pour partir vers ce nouveau rêve. Dix-huit jours d’attente en cargo et, enfin, me voici arrivée. Los Angeles, la cité des Anges, ville trop « tape à l’œil » pour moi. Sur une annonce, je trouve un vieux camion militaire américain aménagé et à louer, je choisis de le prendre pour pouvoir poursuivre mon aventure. Ciao Hollywood, bonjour mon rêve…
Me voici en route pour le désert du Nevada. Afin de ne pas me perdre, je prends la direction de Las Vegas. Plus je m’éloigne du monde urbain, plus le paysage devient aride et vide. Je m’arrête à la dernière station essence, afin de faire le plein, me restaurer et me reposer un peu. Deux auto-stoppeurs français se présentent à moi, Marie, vingt ans et Bastien, vingt-deux ans. Ils me parlent d’un festival musical et artistique « The Burning Man » qui dure neuf jours. Je leur raconte mon rêve et ils me disent que je ne peux pas l’accomplir si je ne vais pas à cet endroit. Je décide de partir avec eux pour profiter de ce Nouveau Monde, de cette nouvelle vie, de cette nouvelle expérience…
Nous voici partis, tous les trois, en direction du nord-ouest du Nevada. La route est longue, les paysages se ressemblent à chaque kilomètre parcouru. Cela nous donne du temps pour faire plus ample connaissance. Je m’aperçois que mon passé est banal par rapport à eux. Ils sont amoureux des rencontres, de la fête, de la musique, de l’art tout simplement. Ils ont parcouru le monde, rencontré diverses cultures. Marie, assise à côté de moi, me parle de ce “Burning Man”. Un endroit aussi mythique qu’idyllique qui nous fait quitter le monde réel. Tout à coup j’entends derrière moi “Prête pour le Paradis ?” Je regarde dans le rétroviseur et je vois Bastien me sourire. Plus nous nous approchons de cet endroit, plus mon impatience est grande. Après de longues heures passées sur cette route interminable, j’aperçois, au loin, une immensité de véhicules stationnés. Est-ce mon imagination qui me joue des tours ? “NOUS Y SOMMES !!!!!” s’écrie Bastien. Enfin, ma véritable aventure commence.
Une fois garés, je descends de mon vieux tas de ferraille et j’aperçois au loin une immense pancarte usée où il y est inscrit « WELCOME TO BLACK ROCK CITY ». Une ville inventée par Larry Dean Harvey dans les années 80 qui accueille toutes religions, toutes ethnies des quatre coins de la planète, où la seule règle imposée dans cet endroit atypique est que l’espèce humaine ne doit faire qu’un pendant ces neuf jours. Je m’approche de l’entrée de la ville et, avec étonnement, j’observe des milliers de gens se rouler par terre au pied de la pancarte. Marie me regarde et m’explique en souriant « Pour être digne d’y entrer, il faut se baptiser… » En compagnie de Marie et de Bastien, je me mets à terre et je me roule dans la terre chauffée par ce soleil intense en pensant à cette expérience inédite et spirituelle qui s’ouvre à moi. Nous nous relevons en même temps. De la tête aux pieds, nous sommes recouverts de terre et de poussière. Marie se met à rire et nous dit : « Ça y est nous sommes baptisés, entrons ! » Elle me fait signe de passer la première et je m’exécute immédiatement.
Me voici entrée dans cette cité des « merveilles ». Devant moi, j’aperçois un gigantesque mannequin en bois surplombant une vaste scène. Numayma est son nom, en référence à un dieu protecteur amérindien. Sur cette immense scène, des artistes se relaient afin de ne pas interrompre cette musique qui permet à l’esprit des personnes de s’évader et de se sentir libre. Je ferme les yeux et me laisse bercer par cette mélodie envoûtante et cet air chaud du désert. Mon esprit n’habite plus mon corps. Autour de moi, le monde n’existe plus. J’ai la sensation de planer au-dessus de cet univers. Je me sens enfin libre…
Le neuvième jour est arrivé. Pendant cette aventure, j’ai pu rencontrer diverses personnes formidables, dont Marie et Bastien, qui m’ont fait découvrir la véritable valeur humaine. J’ai pu, également, rencontrer mon petit chien Mente qui, à force de me suivre pendant plusieurs jours, m’a adoptée. Pour ce dernier jour, l’atmosphère paisible trône toujours sur l’ensemble de la ville. Marie, Bastien et moi, nous nous recueillons à notre campement pour profiter de ces dernières heures.
Pendant le coucher du soleil, l’organisateur réunit les milliers de personnes devant la scène et nous offre un spectacle de lumière rythmé sur un fond de musique électronique. Je n’ai rien vu de tel… À part cette mélodie qui virevolte dans les airs, un silence se fait remarquer auprès de ces citoyens éphémères admiratifs. Chaque émotion échappée a son importance et a son intensité.
La nuit est tombée, le spectacle touche à sa fin. Pour clôturer cet événement, l’organisateur nous demande de tous nous lever. Il prend une torche et met le feu à ce grand mannequin en bois. Micro en main, il crie : « ONE, TWO, THREE ! ! » et, comme un seul être humain, nous répondons tous en laissant échapper ce que nous avons sur le cœur : « THE BURNING MAN ! ! ! »
Ça y est… Une partie de mon rêve a abouti…
FIN