Ce que la généalogie nous apprend de nos ancêtres

Gustave Flaubert disait « Bien des choses s’éclairciraient si nous connaissions notre généalogie ». Longtemps vue comme une activité désuète, la généalogie reste souvent perçue dans l’imaginaire collectif comme un loisir pratiqué par un public âgé. Aujourd’hui, elle est progressivement revenue sur le devant de la scène, devenant une des activités préférées des Français. Mais concrètement, qu’est-ce donc la généalogie ? Il s’agit avant tout d’une enquête amenant à utiliser un ensemble de techniques et de documents, afin d’établir un lien de parenté d’un individu à d’autres.

D’un point de vue historique, la généalogie a longtemps été une science destinée aux puissants et à la noblesse. D’abord utilisée à des fins politiques, cette pratique est régulièrement usitée par la noblesse dès le XIIIe siècle. En effet, l’un des objectifs était de pouvoir prouver les liens d’un souverain à un autre afin d’en légitimer son accession au trône. Au XVIIIe siècle, il s’agissait également de prouver la noblesse et l’importance de sa famille, entraînant beaucoup de nobles, d’érudits ou même de religieux à se plonger dans cette activité. De nos jours, il existe deux types de généalogistes : le généalogiste professionnel successoral et le généalogiste familial qui, dans ce cas particulier, n’est pas toujours un spécialiste. Effectivement, aujourd’hui beaucoup d’amateurs pratiquent cette activité.

L’objet d’étude de cet article vise à présenter l’utilisation des archives dans le cadre de recherches généalogiques familiales, mais également tout ce que l’on peut apprendre et découvrir à propos de nos ancêtres. Afin d’en comprendre tous les tenants et aboutissants, les observations faites reposeront sur des exemples concrets observés dans l’arbre généalogique de la famille Simon, originaire d’un village proche de Troyes dans l’Aube.

Pratiquer la généalogie

Pour débuter un arbre généalogique et des recherches familiales, il est indispensable de disposer d’un certain nombre d’informations. Certaines familles bénéficient parfois d’archives pouvant s’avérer précieuses dans la constitution d’un arbre généalogique. Toutefois, il est important d’avoir en sa connaissance les dates et lieux de naissance d’un maximum d’ancêtres. Souvent, le plus évident est de remonter à partir des grands-parents ou bien même, des arrière-grands-parents. D’autre part, il est essentiel de travailler avec les bonnes ressources et outils numériques accessibles de nos jours. Les premières sources d’informations à privilégier sont les archives manuscrites auxquelles tout le monde peut aujourd’hui accéder grâce aux services des Archives départementales ou des Archives municipales. Ces dernières sont régies selon plusieurs missions, dont la communication des documents. En effet, les archives publiques doivent pouvoir être consultables par tout un chacun. Depuis, la fin des années 1990, la plupart des services départementaux numérisent et mettent en ligne des documents afin de permettre une plus large diffusion. À cela, viennent s’ajouter plusieurs outils numériques s’étant également développés au cours de cette même décennie.

Aujourd’hui, Genanet est sans nul doute un des sites le plus utilisés par les adeptes de la généalogie. En effet, ce dernier est un site aux multiples fonctions. Permettant d’élaborer son propre arbre généalogique, il s’agit aussi d’une riche base de données collaborative alimentée par les membres de la communauté. D’autre part, la base de données de l’INSEE représente également une source d’informations pour les généalogistes, puisqu’elle recense tous les décès survenus après 1970.

La généalogie exige une grande patience et une détermination sans faille. Pour avancer, il faut parfois accepter d’être bloqué, de devoir rebrousser chemin, savoir croiser les sources et passer du temps sur certains registres. Bien qu’ayant tous une importance capitale, il s’agira ici de mentionner les plus récurrents. Parmi eux, le registre d’État civil est, depuis 1792, le document phare de l’identification administrative en France. Bien qu’ayant une fonction similaire, on compte de même les registres paroissiaux qui en revanche étaient tenus par les prêtres durant l’Ancien Régime. Incontestablement, il s’agit d’une ressource importante pour retrouver les actes ayant marqué la vie d’un individu. Ces documents, permettant de retrouver des personnes et ainsi les lier à d’autres, font considérablement avancer la tenue d’un arbre généalogique.

Registres paroissiaux, registres matricules, tables décennales, tables de successions, recensement des populations. Tous ces documents, produits sur plusieurs siècles, sont autant d’éléments à prendre en compte afin de retrouver un ancêtre et de suivre sa lignée. Pour toutes ces raisons, la généalogie demande de la pratique, du temps, de la patience et de l’investissement. Ainsi, l’enquête familiale se dirige avec des questionnements et des observations sur la vie quotidienne de nos ancêtres.

La famille Simon dans l’Aube

La famille Simon est originaire du village de Savières, proche de Troyes. Implantée depuis plusieurs siècles dans ce même village, il s’agit là de l’exemple même d’une lignée plutôt facile à retrouver. Très présente dans les registres d’État civil et les registres paroissiaux, c’était sans nul doute une famille nombreuse depuis plusieurs générations. Néanmoins, un élément intéressant est rapidement apparu. Le nom originel des Simon, présents à Savières, serait Simon dit Roy.

Remontons en 1889, où le 19 novembre, naissait Esope. Si sur son acte de naissance et son matricule de guerre, il est bien mentionné Simon, il semblerait que ce nom de famille n’apparaisse ainsi qu’à partir de 1889. En effet, selon les actes de naissance et de mariage de son père, Benjamin, le nom originel aurait été Simon dit Roy. Ce nom, plus original et spécifique, semblerait venir exclusivement de la région de Troyes. Cela a pu être observé en effectuant quelques recherches sur la base des noms recensés, sur Généanet. De plus, ce nom apparaît dans les registres tels quels, mais également dans les signatures des individus, jusqu’en 1684. À partir de ces découvertes, plusieurs hypothèses sont envisageables. Il était fréquent autrefois de retrouver des noms de famille composés d’un surnom, d’où la mention « dit ». Dans ce cas, pourquoi « dit Roy » ? L’explication reste inconnue et difficile à déterminer. Une chose est certaine, il s’agissait d’une grosse famille, présente dans le village depuis plusieurs siècles. S’agissait-il d’une famille de riches cultivateurs, pouvant être alors comparé à « des rois » ? Une ancienne famille qui un temps aurait pu dominer le village ? Les possibilités sont diverses, mais resteront probablement inconnues.

La généalogie exige une grande patience et une détermination sans failles. Pour avancer, il faut parfois accepter d’être bloqué, de devoir rebrousser chemin, savoir croiser les sources et passer du temps sur certains registres.

La recherche dans les archives peut également être une mine d’informations sur la situation sociale des individus. Toujours en se basant sur l’exemple des Simon dit Roy, on retrouve régulièrement sur certains actes du XVIIIe siècle la mention «  a dit ne savoir signer ». L’absence de signature en dit beaucoup sur l’individu. Il s’agit fréquemment, d’un synonyme d’illettrisme. Jusqu’au XIXe siècle, c’était un phénomène courant dans les milieux ruraux. Ainsi, lors de la consultation d’archives, il peut être frappant de constater la présence de croix ou bien de signatures maladroites.

En remontant son histoire familiale, on est également amené à faire la découverte de métiers pouvant nous être de prime abord inconnus. Par exemple, on retrouve dans l’arbre généalogique des Simon dit Roy, la présence tout au long du XIXe siècle, de bonnetiers et bonnetières. Ce métier apparu durant la fin de l’époque médiévale consistait en la fabrication et le commerce de vêtements en maille. Le nord-est de la France semblait alors être un des bassins de la production. En 1745, une importante manufacture de bas de tricot est créée à Troyes qui, dès lors, est la région qui s’impose dans cette industrie. Avec la révolution industrielle, la production de bonneterie est décuplée tout au long du XIXe siècle, attirant de nombreux travailleurs. Il semblerait que la famille Simon n’y échappe pas. En effet, dans certains documents, notamment dans des actes de mariage, on constate qu’une grande partie des membres de la famille, hommes comme femmes, occupait cette profession.

La généalogie devient une activité de passion, très prenante, pouvant s’avérer touchante. On comprend aisément pourquoi il s’agit aujourd’hui d’une des activités des Français. Il est humain de vouloir savoir d’où l’on vient et connaître nos origines. C’est pourquoi cette activité a pris une telle ampleur. De plus, viennent s’ajouter à cela des nouveautés telles que les tests ADN qui sont de plus en plus en vogue et qui viennent compléter la curiosité des passionnés de généalogie.

Acte de naissance de Benjamin Antoine Simon dit Roy le 2 Mars 1843. 
Arch.dép.Aube, 4E36809. Licence ouverte 2.0
Citer cet article : Sophie Ferrer, "Ce que la généalogie nous apprend de nos ancêtres," in Les Éditions Universitaires d'Avignon : carnet de recherche, 14 décembre 2021, https://eua.hypotheses.org/6469.

Auteur/autrice : Sophie Ferrer

Étudiante en M2 Patrimoines et Cultures numériques et diplômée d’une licence en Histoire, je suis passionnée par toutes les sphères du patrimoine. Grande amatrice de généalogie, j’aime passer du temps dans les archives et remonter les histoires familiales. Je souhaite me spécialiser à la fin de mes études dans la conservation et la documentation des collections patrimoniales.

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